Sorcières, la puissance invaincue des femmes de Mona Chollet

Editions Zones – 234 pages
Littérature suisse

Tremblez, les sorcières reviennent ! disait un slogan féministe des années 1970. Image repoussoir, représentation misogyne héritée des procès et des bûchers des grandes chasses de la Renaissance, la sorcière peut pourtant, affirme Mona Chollet, servir pour les femmes d’aujourd’hui de figure d’une puissance positive, affranchie de toutes les dominations.
Davantage encore que leurs aînées des années 1970, les féministes actuelles semblent hantées par cette figure de la sorcière. Elle est à la fois la victime absolue, celle pour qui on réclame justice, et la rebelle obstinée, insaisissable. Mais qui étaient au juste celles qui, dans l’Europe de la Renaissance, ont été accusées de sorcellerie ?

Ce livre explore trois archétypes de la chasse aux sorcières et examine ce qu’il en reste aujourd’hui, dans nos préjugés et nos représentations : la femme indépendante – les veuves et les célibataires furent particulièrement visées ; la femme sans enfant – l’époque des chasses a marqué la fin de la tolérance pour celles qui prétendaient contrôler leur fécondité ; et la femme âgée – devenue, et restée depuis, un objet d’horreur.

Mais il y est aussi question de la vision du monde que la traque des sorcières a servi à promouvoir, du rapport guerrier qui s’est développé alors tant à l’égard des femmes que de la nature : une double malédiction qui reste à lever.

MON AVIS :

Comme toujours avec Mona Chollet, le sujet traité fait l’objet de nombreuses recherches et fait appel à de multiples sources d’inspiration. Sorcières, la puissance invaincue des femmes est une ode au féminisme, conçue par l’esprit critique de l’autrice. Les thèmes choisis sont clairs et intéressants tout comme son approche qui déconstruit certains mythes ou automatismes sociétaux. Mona Chollet montre dans cet essai, qu’une fois encore, elle est capable de s’emparer d’un sujet actuel pour lui donner une dimension globale : historique, sociologique mais aussi artistique ou journalistique. Une oeuvre qui se dévore et apporte une jolie contribution à la réflexion actuelle sur la place des femmes dans nos sociétés, les attentes que ces dernières placent en elles, les schémas dans lesquels elles restent emprisonnées et leurs capacités d’adaptation.

Depuis, où que je le rencontre, le mot « sorcière » aimante mon attention, comme s’il annonçait toujours une force qui pouvait être mienne.


La sorcière incarne la femme affranchie de toutes les dominations, de toutes les limitations ; elle est un idéal vers lequel tendre, elle montre la voie.


Elles fouettaient l’imagination, procuraient des frissons de frayeur délicieuse, donnaient le sens de l’aventure, ouvraient sur un autre monde. Pendant la récréation, à l’école primaire, mes camarades et moi traquions celle qui avait élu domicile derrière les buissons de la cour, obligés de nous en remettre à nous-mêmes face au flegme incompréhensible du corps enseignant.  La menace flirtait avec la promesse. On sentait soudain que tout était possible, et peut-être aussi que la joliesse inoffensive, la gentillesse gazouillante n’étaient pas le seul destin féminin envisageable.

8 réflexions sur “Sorcières, la puissance invaincue des femmes de Mona Chollet

  1. Bizarre, j’avais loupé ce billet…j’ai personnellement été déçue par cet essai, je m’attendais à ce qu’elle exploite davantage le parallèle entre la chasse aux sorcières et la condition féminine aujourd’hui. Et j’ai trouvé certaines parties très superficielles.

    • Tu n’es pas la première à me le dire mais j’avoue que ça n’a pas gêné ma lecture. Je trouve que le sujet est quand même bien documenté et même si le lien entre sorcières et condition féminine n’est pas vraiment approfondi, j’ai apprécié certaines thématiques pas forcément faciles à traiter (comme le sujet de la maternité/non maternité) Tu l’as chroniqué ?

    • Je suis complètement d’accord et ravie aussi d’avoir découvert ce titre. Si tu aimes l’autrice, je te conseille vraiment Chez soi qui m’avait beaucoup plu !

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