Pierre, de Christian Bobin

Editions Gallimard – 96 pages
Littérature française


Ce livre n’est ni un essai, ni une biographie de Pierre Soulages, c’est un exercice d’admiration doublé d’une réflexion sur la « présence » du peintre et sur « l’énigme du surgissement de toute présence sur terre », qu’il s’agisse du père de l’auteur, d’un chauffeur de taxi ou de l’inconnu rencontré dans le train de Sète.

Après nous avoir fait entendre la voix du peintre, visiter sa demeure parisienne, son atelier-garage, voir ses tableaux, rencontrer ses amis, bref cerner ce qui incarne la « présence » de Soulages, Christian Bobin nous raconte son voyage en train la nuit de Noël 2018 pour fêter à Sète l’anniversaire du peintre, ce qui lui permet de développer sa « thèse de philosophie » et d’achever un portrait intime et « en couleur » du peintre de l’outrenoir.


MON AVIS : 


Une fois encore, Christian Bobin rend hommage à l’âme de l’art, à son essence de survivant, à sa passion démesurée. Il dresse ici, avec tendresse et humilité, le portrait de feu de Pierre Soulages, artiste-peintre profondément admiré.
Comme toujours avec Christian Bobin, l’éternité des heures et la beauté des humbles nous entourent et nous guident, en train, jusqu’à Sète. Une éloge gracieuse, attentive, personnelle, pour celui qui a su toucher même involontairement l’auteur et le faire lui-même sortir du soi.
Une oeuvre joliment écrite, faite d’admiration et de lumière.


Etrange d’aimer un peintre. Je n’aime pas qu’on accroche quelque chose au mur.



Comment je t’écris : j’enfonce ma tête dans le papier, je creuse une galerie, quand je rencontre une racine ou un rocher, je fais demi-tour, je repars ailleurs, chercher l’issue à ce voyage, à cette nuit, à la vie entière.


L’heure approche nécessairement de ma fin comme de ceux qui me liront. Pas de la tienne. Ce livre t’ouvre les bras. Ta mort n’aura pas l’idée de t’y chercher.


J’ai pris le train dans la nuit inhumaine. Je me suis arraché à moi pour te dépouiller de tout, afin de comprendre ce qu’on appelle une présence, un humain lorsqu’il est sans entour.


Et si on ouvrait un livre avec l’espoir non conscient de mourir de joie ? C’est ainsi que j’étais à sept ans. Et si on ne regardait un tableau que dans l’attente de voir une porte s’ouvrir en nous, sur nous ? C’est la part muette des individus qui me passionne – ce beau visage qu’ils ont quand ils ne se savent pas regardés.


Aller vers ceux qu’on aime c’est toujours aller dans l’au-delà.


A l’enterrement d’un oiseau, il n’y a que des saints de quatre ans.

6 réflexions sur “Pierre, de Christian Bobin

      • Je suis allée lire ta très jolie critique mais ne peux pas te laisser de commentaire. Ta chronique est très bien écrire et on ressent bien combien tu apprécies les écrits de Christian Bobin. J’espère que nous aurons l’occasion d’échanger sur certains autres de ses livres. Je viens de terminer « Carnet du soleil », que j’ai beaucoup aimé. Tu as un préféré ? A bientôt,

      • Merci beaucoup ! Oui avec plaisir. Je n’ai pas encore lu « Carnet du soleil. » Bobin écrit des choses tellement profondes mais avec cette simplicité qui lui est propre. J’adore « Louise Amour » et « La dame blanche. » Belle soirée à toi et @très bientôt 🙂

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